Dans Ne vous retournez pas ! de Nicolas Roeg, quête vénitienne angoissante et circulaire de l'enfant perdu, dont s'inspirèrent manifestement aussi bien le de Palma d'Obsession que l'Argento de Phénoména ou le Kyoshi Kurosawa de Séance, on trouve deux séquences en montage alterné de toute beauté, toujours en raccord-mouvements.
La première lie les actes anodins et fonctionnels des parents dans leur villa à ceux de moins en moins assurés de leur fille bientôt noyée au fond du jardin. La seconde entremêle jusqu'au vertige les mouvements du coït entre Donald Sutherland et Julie Christie, avec leurs gestes d'après l'amour, lorsqu'ils se rhabillent et se recoiffent, songent et s'interrogent.
On peut y voir au gré de son humeur, aussi bien la preuve que toute velléité d'action contient en son sein son échec et sa fin, ou à l'inverse que cette perspective même n'empêche ni la tranquillité machinale de notre existence quotidienne, ni le paroxysme d'instants suspendus, qu'au contraire elle renforce.
Commentaires
Le film de Roeg me fait aussi penser à l'antécédent d'Argento Le Chat à neuf queues (1971) avec la recherche du chaperon rouge qui conduit au tueur, la complicité d'un(e) aveugle...
J'ignore tout des rapports entre Roeg et Argento, mais je me demande si le montage alterné voire "proleptique" que vous évoquez dans l'admirable Ne vous retournez pas (pour une fois le titre traduit me paraît aussi riche que le titre original) n'est pas un emprunt complice à ce film : j'ai un net souvenir de la scène, où l'aveugle, jouant aux mots croisés comme on joue à reconstituer une mosaïque, "imagine" brièvement le concierge frappé à la tête.
Malheureusement ma connaissance de Roeg, réduite à ce seul film, m'empêche de savoir si ce dialogue cinématique s'est poursuivi...
Je profite de mon passage pour vous remercier de cet admirable blog.
Merci de votre commentaire Virgil ! Ce rapprochement ne m'avait pas frappé mais maintenant que vous le mentionnez, il me paraît tout à fait évident.
Je n'ai vu qu'Euréka comme autre film de Roeg où de mémoire il me semble pas que ce dialogue avec Argento soit au premier plan, mais il faudrait justement le revoir sous cet angle.