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QUESTIONS

De la côte normande (Pauline à la plage) jusqu’au lac d’Annecy (Le genou de Claire), de Cergy-Pontoise (L’ami de mon amie) à Saint-Jean de Luz (Le rayon vert), le sujet est immuable et les questions sans cesse réitérées : qui aimer, et comment, de qui se faire aimer, et pourquoi, à quel moment commence t’on à aimer, et quand s’arrête-t-on, que faire du désir, jusqu’où le suivre et jusqu’où le brider etc… Les personnages de Rohmer (ces merveilleuses jeunes filles passées au cinéma comme dans un songe avant d’aller grandir ailleurs ; ces acteurs confirmés qui n’ont sans doute jamais été aussi bons, c’est-à-dire aussi dévoilés) en discourent en tous lieux, mettant minutieusement en pratique leurs principes, ou les bafouant, mais découvrant toujours, in fine, que la transparence est un leurre et l’assertion « il n’y a pas de mal à se faire du bien », la plus fausse qui soit. C’est en fait à un écheveau de conséquences que Rohmer nous convie, à la découverte de l’irrémédiable, au voyage dans le temps sans retour en arrière possible, quand par un baiser volé ou une promesse légère, chacun s’est engagé et tout s’enchaîne. C’est dire combien Eric Rohmer n’est pas ce que l’on peut appeler un moderne, comme l’implacable Les nuits de pleine lune le démontre à l’envi !

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Mais si l’on parle beaucoup chez lui, les uns avec les autres et dans toutes les positions, c’est bien de manière cinématographique que ce verbe nous est donné, le cinéaste ne se contentant jamais de placer sa caméra devant des acteurs en train de réciter un texte ou de l’improviser. Au contraire, Rohmer accompagne toujours ces diverses conversations en révélant par le cadre, le hors-champ, le passage de témoin du champ au contrechamp, ce qui se joue sous les mots, tout ce que ceux-ci tentent d’écourter, de prolonger, de différer, d’analyser. A quel moment filmer celui qui parle et à quel moment se tourner vers celui qui écoute ? A quel moment se focaliser sur les joyaux du verbe et combien de temps est-il permis de s’en éloigner pour contempler le monde, c’est-à-dire leur écrin ?

Lien permanent 8 commentaires

Commentaires

  • Absolument, le verbe n'est joyau, chez Romer, que par la façon dont il le fait émerger du visible.

    Excellente analyse, comme toujours.

    Bonne rentrée, cher Ludovic.

  • Géographie et verbe sacrés : les trajets rohmeriens mènent au coeur. Beau texte.

  • Le langage est à la fois ce qui dévoile chez Rohmer (les sentiments, les désirs...) mais qui rend également le monde plus opaque et insaisissable tant le Réel semble difficilement réductible à ce que les hommes veulent en faire.
    Je suis admiratif de la façon dont vous parvenez en quelques phrases à résumer de manière aussi limpide la richesse du cinéma de Rohmer. Bravo et bien content de vous revoir par ici.

  • Ah ma nuit chez Maud...

  • Préau : merci. (je guette toujours vos propos, et sur votre blog la surprenante concision de vos éclairantes citations)

    Valère : merci également. Contrairement à la chanson de Reggiani, Rohmer cependant ne confond jamais "l'amour et la géographie".

    Doc : Oui, tout à fait, moins répondre à des questions qu'accumuler celles-ci.

    Laurence : en effet !

  • Le langage est comme un signe de différence positive ou négative.et qui dévoile la plupart réactions; sentiments, et même les désirs.

  • Ne tombons pas dans la pornographie, Ludo est revenu en entier c'est l'essentiel !

  • Voyance : ne me dites pas que vous venez ici spammer.

    iPidiblue : en effet, il ne me manque rien. Quoique.

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