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A JAMAIS

 

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   Twixt est la contraction de betwixt qui signifie : entre. Entre est l'anagramme partielle d'éternité. L'éternité est une absence de temps sise entre tous les temps possibles et qui ne sont possibles que par cet entre-là. Où chaque temporalité  un jour ou l'autre entre et, détemporalisée, continue mécaniquement.

   Twixt, le film, ce n'est donc pas le Jamais plus du Corbeau de Poe, somme toute reposant, mais l'A jamais de Coppola. Le toujours. L'éternité. Soit bienheureuse, soit damnée : le choix est laissé. Vingt-quatre images par secondes ou à l'heure d'été : l'éternité. Qu'on le veuille ou non. A Dieu plaise ou pas. Exempte la beauté. Qui, elle, meurt. Mais l'éternité de la mort de la beauté. Et celle de la jeunesse à la peau de lait, paupières roses, dents baguées de fer, fine silhouette phosphorique. Et celle des vieux, courbés sur l'horizon des orteils, dont l'usure des chairs, des muscles et des os, lorsqu'ils n'enflent pas, se traduit par un creusement cachectique de tout le corps. Et celle encore du grouillant entre-deux âges, ni jeunes ni vieux, eux tous tant partie intégrante de la ceinture de la rouille autour de l'économie de la connaissance, qu'on ne les nomme plus qu'employés.

   L'éternité coercitive. Même par la voie si soucieuse d'abréger du haiku. Même à travers le geste qui n'en veut plus du suicidé. Du Pendu, un jour de vent / qui souleva la poussière / jusqu’à ses souliers. Pendu, tant de mots pour dire / ne s’est pas tu : / le son s’est perdu. Pendu, pendule / à l’arrêt ? non : cantabile / avec bruit d’arthrose. Pendu, raide, que nul / n'eut occasion de pendre / étant sac et corde. A jamais.

(Jacques Sicard)

Lien permanent 7 commentaires

Commentaires

  • Peu importe les films d'avant, (cités amplement, comparés minutieusement, tout ceci me semble bien artificiel) Twixt est le reflet de l'instant d'une grande solitude;une sorte de perle noire dans laquelle curieusement la réalité s'éprouve, hostile, mais créative d'une sorte d'élan vital parcequ'elle cherche à comprendre le passé par le présent et de cette discordance des temps nait une poèsie lyrique qui renvoie sans cesse à elle même J'ai beaucoup aimé ce film, vous aussi...

  • "Peu importe les fims d'avant" ?
    Mais je donnerais (c'est fait) tous (?) les films de Jonathan Caouette pour un plan, une séquence (par exemple, la scène où la mère, jarret coupé, appelle ses enfants, qui ne l'entendront plus) de "L'Intendant Sansho" de Mizoguchi.
    Il y a dans la scène susdite quelque chose de plus qu'elle-même. "Quelque chose de plus", un sublime indéterminable, qui ne peut être situé dans aucune des caractéristiques positives de la scène, mais qui est engendré par la scène telle que représentée, si bien que la nommer suffit à le rendre sensible au détriment du reste.

  • oui le temps est dans l'instant de votre regard ou de votre appel et à ce moment là peut être il s'abolit sans passé sans futur mais à la fois dans tout celà...le sublime...la transformation alchimique du corps en immatérialité...

  • Le sublime dont il est question dans mon message est un qualité concrète, matérielle, c'est un fait de mise en scène. Rien d'autre. Aucune métaphysique.
    Hors la convention des horloges, bien évidemment le temps est inhérent au regard. Tant qu'il peut, il joue et se joue de ces différents modes : présent, passé, futur. Mais dès que le regard entre dans l'éternité, l'éternité coercitive décrite par "Twixt", il perd sa mesure de temps et se poursuit machinalement comme un signe survivant à son signifié. C'est une damnation, mais une damnation sans aucune sorte de dieu. Là encore, pas de métaphysique.
    Coppola est du côté de Beckett, du moins dans ce film : une fois là, il n'y a pas d'ailleurs ; on ne sort pas : mourir, qui n'a aucune signification en soi, c'est continuer par une autre voie ; toujours, c'est pareil avec les illusions en moins ; toujours, à jamais, éternité n'est ni un état ni un non-état, mais c'est le seul propre de l'homme , etc.

  • Rien de plus scientifique que la sublimation inventée à l'âge de...fer? mais( en fait un peu après et par décision métaphorique) un vieux rapport avec la création...et c'est bien cela dont il s'agit dans ce film comme le dit si bien un autre blogger... Beckett Coppola je ne connais pas assez bien c'est drôle mais pour moi ce n'est pas la piste... c'est votre vision du monde et je vous écoute un peu dubitative... et dans la création il ya ce moment sans passé ni futur ni présent d'ailleurs...

  • Rien de scientifique ni de protohistorique, mais dans ce film un agencement d'éléments concrets qui à terme excèdent cet agencement. On peut appeler cela : le sublime.
    Le sublime : mixte d'échappée belle et d'inutile. Et non pas, la sublimation / purification.
    Si l'atemporalité peut être affaire de création - l'éternité, à laquelle "Twixt" emprunte, est l'absence du temps qui conditionnent toutes les formes de temporalité.

  • Un oubli sous forme de précision.
    Le sublime dont il est question dans mon dernier message se réfère à "L'intendant Sansho" qui fut précédemment l'objet d'un autre (et non pas à '"Twixt" qui en est exempt).
    Ceci encore : parler d'art plutôt que de création, trop connotée religieusement.
    Dans la même idée, l'éternité est ici une dimension profane, quelque chose comme une durée non chronologique. Mais elle reste un substrat.

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