« Un léopard sème la panique à 60 km de Delhi. Parvenu à entrer dans un hôpital et un cinéma, il blesse sept personnes puis échappe à ses poursuivants » (AFP).
Comparativement aux deux premiers films de sa trilogie fantastique tournée au début des années 40 (La Féline et Vaudou), L'Homme-Léopard de Jacques Tourneur est en général jugé décevant, ses admirables scènes d’horreur nocturne s'intégrant mal dans un récit poussif et convenu. Or c'est justement ce déséquilibre qui alimente l’angoisse du spectateur et cette forme paroxystique qui en accroit l’emprise. A l’instar de ce léopard indien galopant brièvement sur la pelouse d’un jardin public, ou bondissant de la façade en stuc d’un cinéma, une présence s’avère d’autant plus violente qu’elle est incongrue, d’autant plus terrifiante qu’elle s’évanouit déjà.
C’est aussi une morale esthétique : l’apparition d’un style sur le mode de l’exacerbation, vaut toujours mieux que la stylisation permanente des codes, ainsi neutralisés. L'envolée poétique impromptue demeure source d'émerveillement, quand la constance d’un maniérisme entretient l'ironie. N’importe quelle particularité, même inconvenante, est en somme préférable au lissage identitaire.