Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

"Ne dites pas à maman que je suis un phénomène"

881f2fd71afff62e9e47e72d6e16db1f.jpg


En dehors d'apporter une pièce de plus aux choux gras du syndrome post-11 septembre, ne serait-ce qu'en utilisant ce plan ouranophobique désormais rituel, Phénomènes ne fait que décliner (la phrase pourrait s'arrêter là tant le film répète ses figures jusqu'à l'ennui profond) l'habituel thésaurus hollywoodien, n'utilisant certaines entités (les Autres, la Nature) qu'à la seule fin puérile d'améliorer les conditions d'existence d'une cellule familiale en cours de désintégration. L'utilitarisme est un dieu et le cinéma son plus sûr dévôt.

A la différence des productions courantes toutefois, les plans ne sont pas saturés d'amorces explicatives mais au contraire engorgés d'une incertitude infantile dûment scénarisée, ce qui finalement ne change rien à l'affaire : aucune progression, aucune régression, aucun parcours en somme, ne sont ici proposés ; semblable au Munich de Spielberg, ce film aux catastrophes inédites, dont la seule raison d'être est justement ce caractère inédit, ne sait que faire diversion entre deux carnages, changer de décor mais jamais d'axe au profit d'exécutions méthodiques, toujours plus élaborées mais jamais mises en perspective ou en contradiction.

Quant à filmer le caractère anxiogène du vent, on indiquera au petit Shyamalan de se rapprocher des oeuvres du grand Argento, car il ne suffit pas de dissimuler un hélicoptère hors-champ pour donner aux bourrasques secouant les branches de la sauvagerie, il faut encore parvenir à inquiéter durablement, c'est-à-dire discriminer dans le champ d'une séquence, ce qui ne bougera pas de ce qui s'agite déjà trop, ce qui se couche d'un coup de ce qui résiste longtemps.

A nouveau un protégé des Cahiers qui ne réussit pas sa mue : certains parrainages sont décidément bien encombrants.

Lien permanent 6 commentaires

Commentaires

  • Jolie chute.
    A propos de chute, ce fut drôle de tomber sur votre voix, hier soir, sur Radio Courtoisie, docteur Maubreuil! Mais qui était cet ennuyeux monsieur auprès de vous qui avait tant de mal à ne pas mettre de "euh..." entre ses phrases?
    Bien à vous,

    H.

  • Je crains d'avoir mis bien plus de "euh" entre mes mots que tous les intervenants réunis tant l'oral a toujours été mon pire ennemi !
    Je compte sur votre indulgence quant à ma prestation, je frémis encore de la banalité de mes propos (enregistrés en direct et à jeun de 12 à 13h30, je le précise !).
    Mon interlocuteur était Philippe d'Hugues qui a écrit un livre très bien renseigné sur un certain impérialisme culturel (Hollywood contre Billancourt), et dont vous trouverez les faits et gestes sur la Toile.

  • Existe-t-il un enregistrement de cette émission ? (Podcast ou assimilable (j'ai été incapable d'en trouver trace sur le site de Radio Courtoisie))

  • La radio vous fait parvenir un CD de toute émission (ou une cassette si vous êtes nostalgique du magnétophone) contre 4 euros.

  • Etrange comme on peut ressentir des films différement. Je ne suis pas un lecteur des Cahiers, ce genre de polémique ne m'intéresse plus, j'ai juste aimé ce film (contrairement à d'autres du cinéaste) pour sa noirceur appaisée. L'ironie qui parcours Phénomènes empêche toute lecture edifiante à la Al Gore ou même puritaine, comme vous le faîtes ici. Certes, l'étau se resserre sur une famille américaine typique (mais ce modèle est désamorcé rapidement dans le film, ne serait ce que lors de la scène de la maison témoin), le fait que la jeune femme soit enceinte à la fin du film pourrais laisser croire que la vraie nature de l'homme est reproductive; néanmoins, l'aphasie de la jeune femme lorsqu'elle découvre le résultat du test de grossesse, le fait que ce test soit filmé comme s'il s'agissait d'une arme (il ressemble d'ailleurs à un cutter) et la distance prise par Shyamalan sur les effusions de joies (bien timides d'ailleurs) qui suivent la "bonne" nouvelle, ainsi que bien d'autres indices, font que je ressens ce tout comme un pamphlet osant joliment et fermement dire l'impasse dans laquelle se trouve actuellement notre monde.
    Aprés je suis d'accord avec vous, Argento filme mieux le vent, mais ici les scènes que vous pointez du doigt représentent peu le film. Et puis la différence avec Argento est qu'ici il ne s'agit pas d'une dimension anxiogène "magique" mais plutôt d'une menace envers laquelle on garde toujours un certain recul, une sorte d'apocalypse douce.
    Par ailleurs, je trouve que ce film réactualise intelligemment la problématique des zombies de Romero. Romero c'est peut être mieux mais je trouve ce film loin d'être négligeable et je dirai même enthousiasmant.

  • Merci de ces bémols à ma note d'humeur, Boulgakov, votre allusion aux zombies de Romero est éclairante, et va pour l'ironie contre l'édification, mais pas jusqu'au pamphlet quand même : on dira que Shyamalan a des velléités mais qu'il sait aussi faire les yeux doux au monde tel qu'il va, au moment opportun. D'ailleurs, beaucoup de critiques se sont étonnés que pour la première fois le cinéaste n'apparaissait pas dans son film, or il est bien crédité au générique de fin, sous le nom de Joey, l'amant qui appelle sur le portable et menace même de venir retrouver la femme du héros, ce qui n'aura pas lieu : Shyamalan menace mais reste dans une confortable incertitude de fond comme de forme. Il est vrai cependant que je préfère largement ce film à ses précédents, même si je ne peux m'empêcher d'être déçu malgré tout par ce qui reste encore trop souvent du scénario filmé.

Les commentaires sont fermés.