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QUATRE MOUCHES DE VELOURS GRIS

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Quatre mouches de velours gris (1972) est sans doute l'un des plus beaux films de Dario Argento, ne serait-ce que par sa façon incroyablement souple de mêler burlesque et terreur, douceur érotique et bouffées de sadisme, rationalisme morbide et délire onirique. S'il y paie dûment son tribut à certains maîtres (Mario Bava, Jacques Tourneur), s'il inscrit dans l'imaginaire des cinéastes américains des décennies suivantes, des thèmes récurrents servi par un découpage obsessionnel (De Palma, Lynch), l'intérêt de ce film est surtout de poser, à travers les trois grandes séquences de meurtres qu'il déroule avec maestria (la bonne, la maîtresse, l'enquêteur), les règles intangibles de son cinéma.

La première a lieu dans un jardin public, après la fermeture. La jeune femme a beau presser le pas puis courir à perdre haleine dans les allées, se glisser entre les failles de plus en plus étroites du mur d'enceinte, essayer même de l'escalader, elle sera rattrapée. Toute fuite est illusoire. La deuxième suit une autre jeune femme, cette fois à l'intérieur d'une maison. Se sachant épiée et menacée, celle-ci finit par se cacher dans une toute petite pièce à l'étage, à l'intérieur d'une armoire, sans pouvoir cependant échapper à son poursuivant. Tout refuge est un piège. La dernière conduit un détective privé à prendre en filature une silhouette qui sans cesse se dérobe (et que nous ne voyons jamais), dans les rues de Turin puis les wagons et les couloirs du métro, jusqu'aux toilettes publiques où il finit assassiné. L'attention visuelle la plus soutenue ne peut empêcher le voyeur de courir à sa perte.

Ainsi, la filmographie d'Argento décline-t-elle de mille et une manières ces trois préceptes impitoyables, ne cessant de nous montrer des victimes en leur fuite inutile, au creux de leur cachette-tombeau, ou bien en cours d'exploration minutieuse d'un espace où s'inscrit déjà leur chute. Ce pessimisme esthétique, à la charnière des années 60 et 70, paraît alors autant moral que politique : il n'y a pas de libération à attendre des échappées psychédéliques ou des ruptures subversives qui invariablement tournent en impasse ; il n'existe plus de valeurs sûres ou de principe intangibles derrière lesquels se réfugier à bon compte ; il ne reste qu'à saluer le règne délétère et sans partage de la fascination, emprise formelle emprisonnant le regard pour mieux conduire à la mort du sujet.

Lien permanent 3 commentaires

Commentaires

  • Excellent !

  • je n'ai jamais vu ce film, je n'aime pas Argento mais j'en aime beaucoup la musique composée par Morricone.

  • Merci Fulvio !

    Et en plus, Christophe, il y a dedans Mimsy Farmer et Jean-Pierre Marielle, l'ensemble devrait j'espère vous convaincre de le voir un jour.

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