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bruno podalydès

  • BECASSINE !

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        Le délicieux cinéma de Bruno Podalydès, à la fois burlesque et mélancolique, est source d’enchantement depuis ses toutes premières œuvres, tel Versailles-Rive Gauche (1992), qui relatait avec une méticulosité augurant bien des catastrophes, les angoisses d’un petit-bourgeois amoureux,  en prise avec toute une série d’imprévus. Il y eut ensuite Dieu seul me voit (1998), conjuguant sous les auspices de Tati, poésie fragile de l’instant et bouffées d’inquiétude existentielle, puis Bancs publics (2009), clôturant cette trilogie sur les affres de la modernité, sorte de baroud d’honneur de l’ingénuité et du hasard, devenus contrefeux au temps des ruses et des programmes. Son dernier en date, le sensible Comme un avion (2014), mettait une fois encore en exergue, tout ce qui résiste au compresseur libéral et au cinéma conventionnel, tout ce qui s’épanouit à leurs lisières.

        « Bécassine » était ainsi pour lui un sujet en or, puisque fidèle à son habitude de renverser le premier degré, de regarder sous l’évidence, ce cinéaste qui avait déjà vivifié Gaston Leroux (avec ces deux petites merveilles d’horlogerie désordonnée que sont Le mystère de la chambre jaune (2003) et Le parfum de la dame en noir (2004)), avait toutes les raisons de ne pas relayer la bête illustration d’une provinciale inculte (le collectif breton Dispac’h, se déclarant à la fois indépendantiste, féministe, anticapitaliste et internationaliste, n’aura fait que jouer les opportunistes, en se scandalisant avant même que d’avoir vu le film), mais au contraire d’exalter à travers ce personnage, tous ceux qui font, le plus naturellement du monde, un décisif pas de côté. Ainsi chez cette nourrice d’un autre temps, décèle-t-il un courage et une capacité d’émerveillement hors du commun, ce qui est bien un acte de résistance quand les pleutres et les cyniques se confondent devant le même prompteur et derrière la même bonne conscience.

        Pour les amoureux des théâtres d’ombres, des lanternes magiques et des marionnettes, voici un récit qui fait se réunir Méliès et ma mère l’Oye, et qui surtout, chose rare au temps des fictions aussi froides que des théories, dégage une atmosphère. Celle-ci a le parfum de l’enfance fantasque, avec ses joies insensées et ses chagrins immenses, et met à l’honneur une vertu aujourd’hui bien oubliée, la sollicitude.

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  • LIENS

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    Connaître le passé n'est pas forcément la meilleure solution pour aimer le présent, mais cela permet au moins de ne pas idéaliser l'avenir. Ce qui évite bien des désagréments. Rien de tel qu'un zoom arrière pour remettre les idées à l'endroit et les fausses gloires à leur place. La belle équipe officie, le tout orchestré par Edouard de Nightswimming.

    Un très joli texte sur un très joli film, Adieu Berthe de Bruno Podalydès, ainsi qu'un autre sur Laura de Preminger, entre lesquels on pourra déceler, et savourer, quelque liens.

    Enfin quelques très aimables recensions des Images secondent sur Insifree, le Journal cinéma du Dr Orlof et Parutions.com.

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  • 112

    "Tout le monde n'est pas pareil !" s'insurge Bernard-Henri Lévy, et c'est au fond ce que tentait de démontrer son ami Strauss-Kahn, certes un peu abruptement, à la soubrette afro-américaine : il y a ceux qui énoncent et ceux qui acquiescent, ou pour le dire plus crûment ceux qui produisent -des "décisions politiques courageuses" comme DSK, des "oeuvres intemporelles" comme Polanski, de "l'art qui divertit" comme les publicitaires ou les patrons de radios libres, voire d'inopinées mais solides érections-, et ceux qui reçoivent.

    Dans Dieu seul me voit, Albert Jeanjean découvre quant à lui qu'aucune femme n'est semblable à une autre, que le mot qui comble celle-ci irrite celle-là, que l'attention portée à l'une séduit l'autre, que l'on perd si l'on s'acharne sans gagner si l'on s'éloigne, et qu'il est en somme urgent de réapprendre à perdre du temps.

    Il n'y a pas à choisir entre la distance amusée de Corto Maltese et l'hésitation inquiète d'Albert Jeanjean, ce sont les deux faces du même bouclier protégeant de l'air du temps, celui des rapines, des expéditions punitives, des mafias abjectes sûres de leurs coups.

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  • 111

    C'est une erreur de croire qu'à travers un roman, un film ou même la critique de ceux-ci, on ne parle que de soi, car c'est exactement l'inverse qui est vrai : on s'y enfouit, tout juste sans doute, mais on y disparaît quand même.

    De la Libye à Strauss-Kahn, le système ne se perpétue et ne distingue qu'en passant de l'apathie à la curée.

    Dieu seul me voit de Podalydès est un film sur le flou des sentiments et les menus détails des rencontres amoureuses, qui à travers la silhouette d'un homme indécis, propose le portrait précis de trois femmes. C'est grâce à ces deux apparents paradoxes qu'il parvient à tirer le (brillant) documentaire sociologique sur les us et coutume des années 80-90, vers le conte moral. Soit le chemin inverse de Desplechin qui sur des thèmes proches et avec parfois les mêmes acteurs, part d'archétypes et de symboles pour singer la chronique contemporaine. Ainsi le premier est-il beaucoup plus proche du Godard de Bande à part, Vivre sa vie ou Une femme mariée qu'il ne le croit, tandis que le second est beaucoup plus fidèle à Truffaut qu'il ne le souhaite.

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  • 106

    Plus on renie et plus on croit : l'abandon est la plus forte des tentations.

    Il lit avec profit, s'informe en conscience, se distrait tout en se cultivant. Sa femme a de beaux sourires tristes et leur fille unique connaît déjà, à huit ans passés, le dénouement de Millénium. Près de l'écran plat, une orchidée, et sur la table basse indonésienne un Jalouse entre deux Télérama. Ils votent Europe Ecologie, parce qu'il est temps, et ne voient pas d'un très bon oeil le retour du populisme. La salade d'endives et l"huile de noix, les vacances à Minorque, le Chi Kong, les pneus-neige, enfin le disque de Mélanie Laurent.

    Sur un matériau assez proche (les amours contrariées ou fantasques de trentenaires urbains et pensifs), Podalydès et Desplechin développent deux cinémas bien différents : pour lier entre elles les tranches de vie qui font le sel de leurs films, le premier privilégie l'espace et le rythme tandis que le second donne une place importante à la mélodie des dialogues. D'un côté le geste, dans la lignée de Tati (celui qui demeure inespéré comme celui qui est de trop), de l'autre le verbe, à la suite de Rohmer (celui qui dévoile et celui qui trompe), comme ferment entre les personnages. Voir la place des objets culturels dans le pesant Un conte de Noël (la Culture qui pense pour nous) et dans l'inventif Versailles, rive gauche (la Culture, on me pardonnera le jeu de mots, qui ne panse plus).

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