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christopher nolan

  • CORRESPONDANCES (15)

    Lorsque la connaissance n'est qu'un travail d’érudition, une accumulation livresque délivrée des coups de fouet du réel, elle donne à l'âme fragile, par son carcan même, l’apparence d’une structure, d’une mémoire, d’un passé. Il est logique alors qu'elle s'emploie au pluriel : je suis ce que je sais, en fait surtout ce que j'ai su, héritier de traditions et de gloses diverses qui m'ont, un jour, fondé et à l’intérieur desquelles je n'espère plus qu’être fondu.
    Dans Memento de Christopher Nolan, la vraie victime, contre toute attente, n’est alors autre que l’amnésique au passé minutieusement tatoué.

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    Or il s’agit bien d’apparences, qui prétendent ériger mais sans véritable colonne vertébrale, qui nomment avant même que d'éprouver, qui classent et rangent à jamais, pour le meilleur des stratagèmes et la pire des prisons : je ne suis que ce que j'ai été, et dans cet enfermement tranquille, rien ne me touche vraiment puisque j'y suis avant tout étranger à moi-même.
    Dans Les Promesses de l'ombre, de David Cronenberg, le véritable perdant est bien, malgré son succès final, le flic déguisé en voyou tatoué.

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    Mais la connaissance peut aussi être envisagée comme un moyen non pas de se faire un nom ou pire une personnalité, une individualité, un "Je", mais bien d’aller au bout de soi. Il faut pour cela en passer par l’accumulation (avant la sédimentation), la multiplicité (avant l'Unité), afin d'être délivré (mais seul).
    Et c'est ainsi que dans la série télévisée Prison Break, le prisonnier qui s'est tatoué sur le corps le plan arachnéen de son évasion future, finit par trouver la sortie, alors que celle-ci n'est autre que l'accès ultime à la tragédie.

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  • BOUCLES

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    Science-fiction hollywoodienne. Quels que soient le danger que l'on affronte, la porte que l'on passe, l'étape que l'on franchit, c'est toujours vers une nouvelle instance de soi qu'on se dirige. De la femme ou du dieu qu'enfin on on se donne, auxquels enfin on se soumet, il n'y a pas à attendre compréhension ou sollicitude, seulement un reflet plus approchant.

    Le déjà-vu n'est ni une coïncidence ni un plagiat, simplement une preuve de plus qu'on n'avance qu'en refaisant sans cesse le même parcours, avec la même candeur et la même vanité. La parodie n'existe pas quand tout se rejoint dans l'hyper-Moi.

    En amont de tout voyage, il y a la certitude qu'on en est déjà revenu.

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  • ÇA TOURNE !

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    Si ça n'arrête pas de tourner, c'est un rêve.

    Si la toupie finit par tomber, le souvenir par s'adoucir, on entre enfin dans la réalité, qui n'est faite que de mouvements épuisés, de peurs et de joies atténuées. Tant que le mouvement perpétuel nous étreint en revanche, tant que l'on suit, en boucle éperdue, le déroulé d'un sourire, d'une démarche, d'une révélation, on navigue à vue en pleine illusion, ivre de rationalisations morbides.

    Le bal des réminiscences est toujours une danse macabre.

    Tout ce qui tourne finit par chavirer, et c'est justement cette chute attendue qui fait la beauté de la danse. Vouloir à toute force contrer cette loi, c'est se condamner à vivre dans le mirage d'un monde illimité, contrôlable à merci.

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  • 89

    Le regret est la ruse habituelle qu'emploie l'erreur pour se renouveler.

    Elle prend une voix de tête afin de convaincre et quelques accents rauques pour s'en excuser, accumule les signaux corporels qui réhaussent son phrasé, s'immobilise pour donner l'impression que seuls ses mots en imposent : elle parle sans garde-fous puis se tait aux aguets.

    Si l'on compare le monde fictif de Gilliam et celui de Nolan, l'un découvert en traversant le miroir d'une attaction foraine (l'Imaginarium du Docteur Parnassus), l'autre en pénétrant des rêves fabriqués (Inception), on est frappé de leur diversité formelle et pourtant d'une certaine parenté (le repliement du décor sur lui-même, le changement d'échelle à vue, les spirales de la caméra). Bien sûr l'un fait dans la démesure kitsch, le gigantisme-bout de ficelle et l'autre dans le sérieux de l'hyperréalisme coûteux, l'un esquisse une réflexion sur l'évolution de l'imaginaire, ses échappées et ses limites, quand l'autre se borne à empiler des récits fictifs sur un réel bien peu crédible, mais l'un comme l'autre restent soumis aux mouvements qu'impose l'imagerie numérique ; leurs signes diffèrent mais suivent la même pente. C'est cela au fond, le sens de ses films d'allure si opposée, qui n'ont su faire de leur singularité qu'une façade couvrant l'identité commune de leur animation (au sens de ce qui les anime) : n'être que des variations techniques, des variables d'ajustement industriel.

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